Psychanalyse et Politique : ’Lhomme sans Gravité

, par  Marie-Odile NOVELLI , popularité : 0%

Psychanalyse et Politique : J’ ai lu L’homme sans gravité" , entretiens de Charles Melman avec Jean-Pierre Lebrun : le regard de deux psychanalistes lacaniens sur le rôle de l’économie de marché sur l’être humain et sur le lien social

J’ ai lu L’homme sans gravité" , entretiens de Charles Melman avec Jean-Pierre Lebrun, tous deux psychiatres et psychanalystes .

L’homme sans gravité, de Charles Melman (folio essais) :



Le regard d’un Psychanalyste Lacanien, interviewé par un collègue ( Jean Pierre Lebrun) sur les évolutions de la société, et notamment sur le rôle de l’économie de marché sur l’être humain et sur le lien social, ainsi que le rôle de la science (et accessoirement de la psychanalyse).

La démarche même est interessante : car si les années 70 nous avaient (relativement) habitués à ces convergences entre psychanalyse et politique, depuis, ce champ de recherche était devenu assez confidentiel.
Charles Melman et JP Lebrun apportent donc là un regard nouveau.

Ce dialogue n’est pas un essai mais il me parait bien vulgarisé. Il est d’ailleurs doté d’un glossaire bien conçu indispensable pour profiter pleinement de la lecture. Même si
quelques affirmations peuvent déplaire ( rôle central du patriarcat, pulsion de mort), la démarche me parait de plus très apte à ouvrir le dialogue *


Leur thèse centrale est qu’un « homme libéral » serait en formation, bouleversant l’ancienne économie psychique.

Nous serions en train de passer d’une culture fondée sur le refoulement, et donc sur la névrose, à une culture qui promeut la perversion, ultime défense contre la psychose.
La nouveauté réside dans le nouveau statut de l’objet introduit par l’ultralibéralisme : si, pour le névrosé, tout objet se présentait sur fond d’absence (« castration » au sens Lacanien), pour le pervers, en revanche, il s’agit d’exhiber en permanence ce qui, ordinairement, se trouve dérobé. La perversion se trouverait ainsi au principe de toutes les relations sociales . Condamné à la jeunesse et à la jouissance , voire à l’exibitionnisme, le nouveau "sujet" se trouve malléable, et en proie aux addictions et à l’effacement des repères .
En résumé, notre rapport au monde n’est plus marqué par le manque , mais par le surplus de présence, par l’accent mis sur la possession de l’objet. D’où un affaiblissement important du "sujet". (S’abstenir de tout lien avec le style Sarkozy" !). On notera au passage que le langage, symbole par excellence, qui autorise la distance, le manque, et crée le sujet, est soumis à rude épreuve aujourd’hui, où domine le signe.

Si le livre a un caractère assez prédictif (tout est mûr pour un retour de bâton autoritaire, voir totalitaire, terroriste !), il offre peu de solutions, et on peut le regretter, même si cela incombe plutôt aux politiques.
Il n’oublie pas le 4eme pouvoir et le rôle des médias, ce qui est interessant.
Mais cette partie mériterait d’être développée.
Le regard de Melman sur la domination de la science dans notre société est plutôt sévère même s’il parle de positivisme et non de scientisme. Un écologiste parlerait , lui, plutôt de technoscience, et insisterait sur le lien de celle ci avec l’économie de marché. Mais , bon....le diagnostic est partagé.

En conclusion, ce livre donne envie de pousuivre la route, et en ce qui me concerne, rendue à nouveau consciente du rôle du langage dans la constitution de la psyché humaine (mes études littéraires sont déjà loin), il me donne envie de creuser la question de l’évolution du langage actuel, de la domination du signe et des conséquences de cette évolution...

Peut -être dans une 3ème vie ?

MO.N

(*ainsi , pour un regard intéressé mais critique lire http://www.psychasoc.com/index.php)
(plus récisément
http://209.85.135.104/search?q=cache:_isJxccjey8J:www.psychasoc.com/article.php%3FID%3D475+charles+Melman+l%27homme+sans+gravit%C3%A9%22&hl=fr&ct=clnk&cd=20&gl=fr&client=firefox-a)