RETRAITES, la LOI PROMUlGUÉE : ET MAINTENANT ?

, par  Marie-Odile NOVELLI , popularité : 0%

Ce mardi soir 9 Novembre, la loi a été promulguée par le Président de la république. Les éléments scandaleusement injustes du projet demeurent/ Il y a 3 jours, Samedi 6 Novembre 2010, se déroulait la 8ème manifestation sur les retraites. Moins de monde, mais encore 10 000 personnes à Grenoble. // ET MAINTENANT ?

- 
- -

Ce mardi soir 9 Novembre, la loi a été promulguée par le Président de la république (legifrance). Le Président de la république aura été jusqu’au bout de sa logique de passage en Force, rejetant la démocratie sociale.
Les éléments scandaleusement injustes du projet demeurent (voir infra "Les scandales majeurs"). Le rééxamen sera incontournable, en 2012- 2013.


LES SCANDALES MAJEURS DE LA LOI  :
- Il faudra attendre d’avoir 67 ans pour avoir une retraite à taux pleins, ce qui nous place parmi les pays les plus "durs" d’Europe. voir
-Il faudra avoir 41,5 annuités de travail, alors qu’en Allemagne, les annuités obligatoires sont de 35 ans.
Et pour maintenir en emploi les travailleurs jusqu’à 62 ans, il faudrait créer, -ya qu’à ! 1,6 millions d’emplois !
-Comme le dit Alain Lipietz, (voir infra) "Les uns travailleront plus. Les autres, jeunes, femmes, sans qualification, quinquas, erreront du chômage à la précarité dans un aller-retour incessant. "
-Au moins, cela permet-il de régler le problème financier ? Pas du tout. Il ne le règle pas après 2020.voir art. alternatives économiques 17 juin 2010.

-Alors qu’on pourrait disposer chaque de près de 100 milliards de plus, largement assez, si on n’avait pas touché au bareme de l’impôt sur le revenu depuis 1999 (lire mon article "Réforme des retraites, rigueur et "affaire Bettencourt- Woerth" ).
Zoom sur le "trou" :
Le "trou" annuel est de 10 à 15 milliards chaque année, ce qui en cumulé fait 125 milliards en 2018. Le déficit s’accroit, il serait en 2015 de 40 Milliards et en 2050 de 125 milliards environ par an.
A replacer dans le cadre du déficit de la sécurité sociale  : 30 Milliards en 2010 contre 8,1 M. pour la caisse d’assurance vieillesse (retraites) selon le Figaro. Lire également : financement de la sécurité sociale pour 2011, explication de vote par Anny Poursinoff voir )
Voir, également, le graphique relatif au déficit de la sécurité socialerepris par Wikipedia (où l’on voit au passage que les comptes étaient positifs durant les années Jospin) : voir et voir agoravox
. Voir, enfin, art. le monde Drevet, d’ attac
-La "réforme " demandera des efforts, c’est pourquoi il convient d’être juste.
Or, la "réforme " est injuste : elle fait porter l’effort supplémentaire sur ceux qui ont commencé à travailler jeunes. Elle ignore, comme le signalent régulièrement les écologistes, les effets sur l’espérance de vie de l’exposition à des produits toxiques ou cancérigènes, au port de lourdes charges, au travail de nuit.

Et maintenant ?

EUROPE ECOLOGIE, DES SYNDICATS et THINK-THANK planchent sur des propositions qui devront intégrer fiscalité et emploi.
Ainsi, Eva Joly
propose un alignement complet de la fiscalité du patrimoine sur celle des salaires, et un taux d’impôt de 50% pour les revenus de la tranche supérieure à 70 000 euros par an pour un célibataire ;
Pierre Larrouturrou (passé du PS à Europe écologie-Les Verts), dans ses Etats généraux de l’emploi - avec notamment les gros syndicats le CJD- travaille sur un programme pour diviser le chômage par 2 en 5 ans, et les émissions de gaz à effet de serre par 2 en 10 ans. Et Pascal Canfin - journaliste économiste, député européen Europe Ecologie, discute avec "Terra Nova", think thank proche PS où (selon Marianne n° 707, un bon numéro avec plusieurs dossiers d’actu) "l’on croise aussi des communistes".
Bref, ça bouge plus que l’on ne croit. L’important étant que la réflexion, mais aussi, le débat et l’échange de solutions, un apport de ce conflit social, ne faiblisse pas.
Alors, malgré les quelques ratés des partis de gauche (notamment la capacité à parler vrai), malgré le fait que le PS ait maintenu officiellement les 41,5 ans de cotisations sociales et pas vraiment contesté les 67 ans nécessaires pour un taux plein, malgré toute la colère que peuvent susciter les décisions du "Président des riches" et la période maussade, pour finir, haut les coeurs !
MO.N-

LES DEUX MOIS DE MANIFESTATIONS PRECEDENTES :

-
(Photo DL 13 et 17.10.10)

Il y a 3 jours, Samedi 6 Novembre 2010, se déroulait la 8 ème manifestation unitaire sur les retraites :
Sans doute 4 à 5 fois moins de monde qu’au début, depuis que la réforme est adoptée. Mais encore 10 000 personnes à Grenoble.

_________________________________________________________

28 Octobre : derniers coups de force du gouvernement sur les retraites


Tandis que l’UMP au pouvoir passe en force face à la rue et à l’assemblée nationale (notamment en imposant le vote bloqué au Sénat), selon Médiapart, le frère du président vise le pactole du marché de la retraite complémentaire privée.lire...

Le gouvernement des riches :

Le gouvernement fait échouer deux propositions de parlementaires UMP, une taxant les fabricants de cigarettes, l’autre augmentant le taux des prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine et les produits de placement avec une recette annuelle de 5, 4 milliards d’euros à la clef.
Pour le ministre du budget, ces idées étaient dangereuses. "Ça nous faisait prendre le risque de passer sous la ligne de flottaison, c’est-à-dire qu’à un moment donné l’impôt est confiscatoire ou dissuasif".
Ca coule de source, en effet : pourquoi diable imposer les plus aisés qui placent leur argent quand on peut réduire la vie des retraités les plus pauvres ??

____________________________________________________________

Manifestations des 12 et 16 Octobre 2010

Négociations bloquées. La mobilisation qui reste forte s’étend aux jeunes, et les grèves s’installent. Lire notre communiqué : cliquer

LE GOUVERNEMENT A BLOQUE LES NEGOCIATIONS ALORS QUE LES CONCESSIONS GOUVERNEMENTALES ONT ETE TROP MINEURES :
Outre que l’effort de financement repose essentiellement sur ceux qui ont commencé à travailler jeunes, ce projet ignore toujours les effets sur l’espérance de vie du travail de nuit, des produits toxiques cancérigènes ou du port de lourdes charges…
--
PHOTOS MANIF DU 2.10/10 et DU 23/9/10, BIEN SUIVIE (Celle DU 2.10 en hausse d’environ 5000 pers. par rapport à celle du 23/9, une mobilisation qui ne faiblit pas, comparable à celle du 4/7 ci-dessous)
______________________________________________________________

La mobilisation le 7 septembre


-

- -


(extrait Dauphine libéré 8 sept.2010)
*lire aussi le communiqué des députés écologistes
lire aussi "désinformation sur les retraites"
*lire aussi mon article "Réforme des retraites, rigueur et "affaire Bettencourt- Woerth"

En fin de matinée, à Grenoble, pas moins de 40 000 manifestants.
Il y avait tellement de monde que nous avons encore attendu sur place plus d’une heure et demie après que le début du cortège n’ait commencé à s’ ébranler.
A l’opposé de la valeur pour l’actionnaire et du « travailler plus pour vivre moins », l’objectif pour nous serait d’organiser une juste répartition des richesses, la réduction des inégalités, le partage du travail et une redéfinition des finalités de l’activité économique (voir l’article d’ Alain lipietz infra).

A défaut, en attendant une alternance digne de ce nom, et un "changement de logiciel" d’une partie de la gauche (nous y travaillons) il nous faut tout faire pour améliorer le projet du gouvernement.
MO. N.

-

Voici le point de vue publié par Alain Lipietz (économiste, ancien député européen Vert) dans le Monde du 14 juin :

Réforme des retraites : l’autre solution

Après un mois de consultations en trompe-l’oeil, le gouvernement a remis sa copie aux syndicats et au patronat. Ce document d’orientation est précieux, car il renferme toutes les contre-vérités proférées et fausses solutions avancées depuis près de vingt ans. Choc démographique, catastrophe des régimes de retraite par répartition et travailler plus longtemps se mêlent dans un projet aussi mystificateur qu’inefficace.

Y a-t-il un choc démographique ? Oui, répond le document d’orientation. Non, a répondu à plusieurs reprises le Conseil d’orientation des retraites (COR) dont les conclusions sont sciemment travesties.

Ainsi, la France connaît un allongement de l’espérance de vie, heureuse nouvelle, et une fécondité qui la place juste au niveau du seuil de renouvellement des générations. Le COR a également établi, sans que cela soit contesté, que l’aggravation des déficits des comptes sociaux était essentiellement due à la crise financière et non pas à l’évolution démographique : en 2006, le déficit de l’ensemble du système de retraite était de 2,2 milliards d’euros ; en 2008, il atteignait 10,9 milliards et il devrait être de 32,2 milliards en 2010. La démographie n’exerce son influence qu’à moyen et long terme, et pas dans une accélération foudroyante en quelques mois.

N’y a-t-il qu’une seule solution ? Oui, répond le document d’orientation après avoir écarté sans examen les autres. Une fois ce coup de force perpétré, la réponse est assénée : « Répondre à un déséquilibre démographique par des solutions démographiques. » Elle vaut ce que vaut le diagnostic : erreur magistrale. Le gouvernement s’engage à « écarter toute solution qui baisserait le niveau de vie des Français ou augmenterait le chômage ». Or, obliger les salariés à travailler plus longtemps (recul de l’âge légal de la retraite, augmentation de la durée de cotisation, ou combinaison des deux) entraîne obligatoirement une baisse du niveau des pensions sans qu’il soit nécessaire de l’annoncer. Nous le savions depuis les réformes de 1993 et de 2003, nous sommes prévenus pour celle de 2010.

Quand la situation économique reste et restera marquée par un chômage très élevé, l’engagement à « écarter toute solution qui baisserait le niveau de vie des Français ou augmenterait le chômage » est un faux-semblant : le travail forcé des seniors se substituera à l’emploi des jeunes en l’absence de création d’emplois en nombre suffisant, et ce surtout en accroissant la durée individuelle du travail.

Les uns travailleront plus. Les autres, jeunes, femmes, sans qualification, quinquas, erreront du chômage à la précarité dans un aller-retour incessant. Ce ne sont pas les velléités de tenir compte de la pénibilité de ceux qui auront déjà été brisés par une longue vie de travail qui atténueront la violence du capitalisme néolibéral exigeant toujours plus de productivité et de rentabilité.

La promesse de créer « une contribution supplémentaire de solidarité sur les hauts revenus et les revenus du capital sans restitution au titre du bouclier fiscal » sauvera-t-elle l’ensemble ? Rien n’est moins sûr. On nous annonce une contribution pouvant aller jusqu’à quelques milliards d’euros, alors que le gouvernement n’arrête pas d’apeurer la population avec des déficits de l’ordre de 100 milliards en 2050.

Ce sont des mesures d’une autre ampleur qu’il faut prendre pour développer notre système de retraite par répartition, notamment en réorientant les politiques économiques qui privilégient la finance au détriment de l’emploi, de la formation et des salaires et qui sont au cœur du financement des retraites : un million d’emplois en plus, c’est déjà 5 milliards d’euros de recettes supplémentaires. Il y a aussi des marges d’action importantes en favorisant un plus fort taux d’emploi des femmes, la France se situant au 15e rang de l’Union européenne. La répartition des revenus dans notre pays a, depuis un quart de siècle, tourné à l’avantage décisif des actionnaires et des très hauts salariés managers. Une simple application du taux de cotisation patronale aux dividendes distribués comblerait immédiatement tout le déficit actuel de la Caisse nationale d’assurance-vieillesse.

L’argument éculé de la perte de compétitivité est ici fallacieux, puisqu’il s’agirait de n’amputer que les dividendes nets reçus par les actionnaires et non les capacités d’investissement des entreprises, et parce que cela ne renchérirait pas les coûts de production. La retraite à 60 ans à taux plein peut être garantie à tous les salariés si de tels choix politiques sont faits aujourd’hui.

Pour couronner le tout, le document d’orientation se prononce en faveur d’une réforme systémique prochaine pour aller vers un système « par points » ou « par comptes notionnels ». Là aussi, le gouvernement piétine les conclusions du rapport du COR de janvier qui a montré le risque d’individualisation exacerbée d’une telle réforme et, ce qui n’est pas le moins savoureux, l’incapacité de tels systèmes à surmonter un choc démographique ou économique.

Deux conclusions s’imposent donc. Primo, la crise financière surdétermine la frénésie avec laquelle tous les gouvernements du monde s’acharnent à imposer des plans d’austérité dont les salariés et les retraités font aujourd’hui les frais, tandis que les tenants de la finance se refont une santé sur le compte des budgets publics ou grâce aux garanties accordées par les États.

Secundo, la volonté de faire travailler toujours davantage manifeste le refus de reconsidérer la place du travail dans notre société, le refus aussi d’apprécier l’immense contribution des personnes retraitées, en termes de lien social et de création de services utiles à la société. Bref, l’obstination à promouvoir une société engagée dans un cycle productiviste sans fin.

Notre détermination à faire échec au projet du gouvernement est donc intacte : à l’opposé de la valeur pour l’actionnaire et du « travailler plus pour vivre moins », organisons une juste répartition des richesses, la réduction des inégalités, le partage du travail et une redéfinition des finalités de l’activité économique.