Grenelle de l’environnement aujourd’hui
GRENELLE DE L’ENVIRONNEMENT : des avancées sur le bâtiment et l’agriculture biologique, mais vives interrogations concernant les déplacements, la taxe carbone, les pesticides et les OGM ... Pas de Deloppement Durable pour les quartiers urbains,ni de précautions face à certains risques pour la santé liées aux nouvelles technologies ! Et reste à voir quelle sera la suite donnée, dans un pays qui s’est trop souvent contenté de paroles au lieu d’actes en matière d’environnement !
GRENELLE : des avancées sur le bâtiment et l’agriculture bio, mais de vives interrogations concernant les déplacements, la taxe carbone , les pesticides et les OGM ... Pas de Deloppement Durable pour les quartiers urbains , ni de précautions face à certains risques pour la santé liées aux nouvelles technologies !
1. Bâtiment
Un accord semble trouvé pour renforcer les normes d’efficacité énergétique dans le bâtiment...
Mais un accord cellant des objectifs plutôt modestes :
"nous allons passer à 50 kwh/m2 contre 260 actuellement [ancien et neuf confondus], d’ici 2012." Fort bien . "L’ensemble des bâtiments publics devront engager dès maintenant une réduction de la consommation finale d’énergie de 20 % d’ici 2010 " a dit Jl Borloo.
Ah ? Mais l’engagement officiel de la France au niveau international reste de diviser par 4 (pas de réduire de 20 ou 40% ou même 100% ) les émissions de GES (Gaz à effet de serre) d’ici 2050 !!
Inutile de dire qu’on est encore loin du compte.. .
Soit dit dit en passant, la région Rhône Alpes, par le biais de la délégation que je conduis, n’ a pas attendu le Grenelle pour mettre en place une stratégie de formation et d’appui financier pour permettre aux bailleurs sociaux d’avoir 2 règlementations thermiques d’avance...( Lire sur ce site ).
Je m’interroge aussi sur les moyens financiers et concrets qui seront finalement retenus par le gouvernement (notamment prêts bonifiés pour réhabiliter les bâtiments existant ..) Sans parler de l’accent exclusivement mis sur l’energie et le C02, alors que le bâtiment comporte bien d’autres enjeux tels que la qualité des matériaux, et l’ impact sur la santé de leur toxicité.
Enfin, il n’y a pas de réflexion sur ce que pourraient être des "écoquartiers" au sens où l’entendent les Verts, mais aussi les pays nordiques (voir site des Verts 38), pas même de réflexion sur la rénovation des quartiers dans le cadre de l’ ANRU !
2. Autoroutes
Le ministre de l’écologie Jean-Louis Borloo s’est engagé aujourd’hui à ne plus augmenter "de façon significative" les capacités routières et aéroportuaires, " sauf contournement des villes". S’ajoute la proposition(encore à préciser) d’écopastilles pour les véhicules polluants et emissifs de CO2..
Oui...
Semi - victoire seulement.
Voici , pour être plus explicite et plus clair, la réaction des Verts :
"Abandon des autoroutes : M. Borloo, donnez-nous des noms !
Communiqué de presse du 24 octobre 2007
Aujourd’hui, veille du discours conclusif de Nicolas Sarkozy, Jean-Louis Borloo annonce l’abandon des projets autoroutiers à l’exception des contournements des villes et des points noirs.*
Apparemment positive, cette annonce pourrait être inquiétante.
En France, sur la cinquantaine de grands projets routiers, la très grande majorité sont des contournements urbains. Pour le reste, il est fort à craindre que beaucoup d’autres soient qualifiés de "points noirs"... terme pour le moins subjectif.
Si le ministre veut nous convaincre qu’il résout effectivement les problèmes, qu’il donne des noms, et qu’il indique aujourd’hui même lesquels de la cinquantaine de projets autoroutiers sont abandonnés.
Par exemple, quel projet d’île-de-France ne vise t’il pas à résorber un " point noir " ? Va t’on oui ou non continuer la construction d’autoroutes dans cette région ? Qu’en est-t-il du grand contournement de Strasbourg ? de celui de Bordeaux ? cette annonce signifie-t-elle que la construction de l’A51 dans les Alpes sera abondonnée dè demain ?
Par ailleurs, il faut rappeler que les contournements d’agglomération sont néfastes car ils sont responsables de l’étalement urbain et de l’augmentation du trafic routier. Pourquoi s’obstine-t-on à vouloir en construire ?"
Yann Wehrling, Porte-parole des Verts
3. Agriculture biologique, du progrès. Pesticides et OGM, le règne du flou !
En matière agricole, l’accord a consisté en à faire passer la proportion de surfaces consacrées à l’agriculture bio de 2% aujourd’hui à 6% d’ici à 2012. Du progrès.
Les choses ne sont pas ausi claires pour les pesticides.
La France est l’un des principaux pays consommateurs de pesticides,c’est à dire de chimie toxique via les produits cultivés.
C’est le fruit de notre histoire, et de la place prise par les lobbies.
Pourtant, les choses étaient bien enclenchées. Mais au dernier moment, alors que la synthèses du groupe de travail était achevée, les representants du gouvernement ont apitulé devant certaines pressions (notamment de la FNSEA), et l’objectif consensuel de réduction de 50% des traitements aux pesticides en 10 ans a volé en éclat. Désormais, il n’y a plus de calendrier !
Pour les OGM, même pirouette : Un gel des cultures (en hivers, lorsque’on ne plante pas) avant une loi (quel contenu ?) au printemps. les Verts , la confédération paysanne, et les associations écologistes auraient préféré une interdiction de culture en plein champ, assorti d’une autorisation de culture en milieu confiné.
4.Nombre de sujets ne seront pas traités dans le Grenelle, notamment les risques liés à certaines technologiques :
- la question des déchets nucléaires et de l’épuisement attendu des ressources d’uranium, non pris en considération dans les propositions du Grenelle. Et le fait que l’energie nucléaire n’est pas, globalement, une solution alternative. Je renvoie à l’interview du responsable de "sortir du nucléaire", qui a le mérite de la clarté.(*voir en bas de page).
-La question des incinérateurs , qui devrait pouvoir beneficier d’un moratoire, "sauf en dernier recours"
-Celle des teléphones portables, dont deux études viennent de confirmer le rôle cancérigène),
et , enfin, la question des agrocarburants, "tragédie planétaire" à venir ... voir sur ce site, cette annonce est moins satisfaisante qu’il n’y parait de prime abord.
5.
Enfin, la mesure emblématique pour les écologistes, la taxe énergie -carbone, a du plomb dans l’aile.
Sur le sujet le plus révelateur d’une réelle volonté politique, la décision n’est pas venue : comme le note la revue "l’expansion", le chef de l’Etat s’est engagé jeudi à étudier « la création d’une taxe climat-énergie, en contrepartie d’un allègement de la taxation du travail », dans le cadre d’une révision générale de tous les prélèvements obligatoires. En attendant, Nicolas Sarkozy a rappelé son hostilité « contre toute fiscalité supplémentaire ». Il a préféré s’en remettre au « niveau communautaire » et a donc demandé à José Manuel Barroso d’arrêter le principe d’une taxe sur les produits importés qui ne respectent pas le protocole de Kyoto et a appelé de ses vœux une TVA à taux réduit sur les produits qui respectent le climat et la biodiversité. Mais là encore, la décision relèverait de la commission européenne.
6.Reste une plus value indéniable du Grenelle : avoir fait dialoguer des groupes sociaux qui n’étaient pas habitués à le faire.
Un début de construction de l’intéret general , qui se démarquerait du seul lien élus /gouvernement/lobbies qui a trop souvent prévalu en France ?
Enfin, je veux le croire !
7. La suite ?
Pour finir, reste à voir quelles sera l’attitude des députés, peu réputés pour leur conscience écologique.
Le moindre recul complémentaire viderait le Grenelle de son sens, dans un pays qui s’est jusqu’ici contenté de paroles au lieu d’actes en matière d’environnement.
MO N
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Entretien avec le porte-parole du réseau Sortir du nucléaire
Stéphane Lhomme : "Le Grenelle de l’environnement est une défaite majeure pour l’écologie"
LEMONDE.FR ( 31.10.07 )
En conclusion du Grenelle de l’environnement, le président Nicolas Sarkozy a souligné que pour lutter contre le réchauffement climatique, la France doit opter pour l’énergie nucléaire, sinon elle devra ’’renoncer à la croissance’’. Réfutez-vous cette alternative ?
Si le nucléaire permettait vraiment de limiter les émissions de gaz à effet de serre et de suppléer au pétrole, il serait peut-être légitime de discuter de cette option. Mais selon l’Agence mondiale de l’énergie (AIE), le nucléaire ne couvre que 2,5 % de la consommation mondiale d’énergie, une part si faible que son impact sur le climat est quasi nul. De plus, contrairement à ce qui nous est souvent dit, cette part va encore se réduire dans les années à venir : l’AIE reconnaît que la part du nucléaire dans l’électricité mondiale va passer de 17 % à 12 % en 2030, c’est-à-dire environ 1,5 % de la consommation mondiale d’énergie. Tant qu’on croit que le nucléaire va empêcher, même partiellement, le réchauffement climatique, ce dernier aura de beaux jours devant lui.
Les ONG écologistes qui ont participé au Grenelle de l’environnement ont très vite accepté que l’avenir du nucléaire civil français reste en dehors du débat. Comment jugez-vous cette acceptation ?
Ces associations ont certainement estimé qu’elles pourraient se rattraper sur d’autres thèmes (biodiversité, transports, etc). Ce qu’elles n’ont pas compris, c’est qu’en se pliant au "préalable pronucléaire", imposé par M. Sarkozy, y compris son incroyable accord nucléaire avec le dictateur libyen Kadhafi, elles sont allées à la négociation déjà vaincues, soumises. Logiquement, elles ont été balayées sur l’ensemble des dossiers. En effet, contrairement à tout ce qui nous a été affirmé par la puissante communication élyséenne, le Grenelle est une défaite majeure pour l’écologie :
- réduction des pesticides... "si possible"
- moratoire autoroutier sauf contournements d’agglomérations ou "points noirs", autant dire que la plupart des projets actuels seront validés
- OGM : un gel... pendant l’hiver
- moratoire sur les incinérateurs : sauf en "dernier recours"... ce qui ne manquera pas de se produire
Le sommet a été atteint avec le nucléaire : M. Sarkozy a abusé l’opinion en annonçant qu’il n’y aurait pas de "nouveaux sites". Or, les projets de nouveaux réacteurs sont tous prévus dans des sites déjà existants ! Dans un pays où il y a 58 réacteurs en service (plus une douzaine déjà arrêtés, qui restent à démanteler), des projets à foison (EPR, ITER, etc.), des sites nucléaires gigantesques (La Hague, Tricastin, Cadarache, Marcoule, Bure, etc.), l’attitude des associations "compatibles Grenelle", qui ont baissé pavillon sur ce sujet, est tout simplement indigne.
L’écologie politique s’était jusqu’ici plus concentrée sur la lutte contre le nucléaire, la sortie du pétrole venant bien après. C’est en train de changer, semble-t-il...
C’est en train de changer dans le discours du pouvoir et celui des éditorialistes. Ce sont eux qui ont "décrété" que, subitement, le nucléaire n’était plus un problème, et même que c’était une "solution", et ce discours s’est imposé en continu. A force de répéter des choses parfaitement fausses, elle ont fini par devenir "vraies". En réalité, jamais la facture énergétique de la France n’a été aussi élevée. Et encore, il faut y ajouter la facture nucléaire (démantèlement, déchets) qui s’annonce astronomique. Entre 2003 et 2005, c’est l’Allemagne qui est exportatrice nette d’électricité vers la France, elle ne sort donc pas du nucléaire "en important l’électricité nucléaire française". Tout est à l’avenant : le nucléaire ne subsiste que grâce à des mensonges d’Etat entretenus par la publicité ou les discours du personnel politique.
Du Maroc à l’Iran en passant par l’Egypte, beaucoup de pays en développement souhaitent faire appel au nucléaire. Ont-ils un autre choix, compte tenu du coût de développement des énergies renouvelables ?
Il faut bien comprendre que, même si ces pays développent - hélas - des programmes nucléaires, cela ne couvrira qu’une part infime de leur consommation énergétique. Même la Chine, qui annonce 40 nouveaux réacteurs, espère seulement couvrir ainsi 4 % de son électricité, soit 0,7 % de sa consommation d’énergie. Dans ces dossiers, le nucléaire n’est en rien un outil d’indépendance énergétique : ce qui est en jeu, c’est soit une forme de "fierté" mal placée (du genre "Nous aussi, nous avons du nucléaire"), soit des considérations géopolitiques (ce sont les Etats-Unis qui poussent l’Egypte à relancer son programme nucléaire, pour contrecarrer la montée en puissance d’autres pays). Mais, dans tous les cas, il faut bien noter que ce ne sont jamais les peuples mais les dirigeants - souvent des autocrates - qui veulent du nucléaire.
Les antinucléaires sont souvent accusés de faire le jeu des pétroliers. Que répondez-vous ?
Il se trouve que nous dénonçons autant les uns que les autres car, contrairement à une idée reçue, ils ne sont pas concurrents mais ont des intérêts identiques : faire en sorte que nous consommions toujours plus d’énergie, litres de pétrole ou kilowattheures d’électricité. Leur seule crainte est la mise en place d’une société sobre qui développerait les économies d’énergie et les énergies renouvelables... et sabrerait leurs profits. D’ailleurs, en France, Total et Areva sont actionnaires croisés. Aux Etats-Unis, le plan énergétique de Bush impose de nouveaux forages pétroliers et de nouveaux réacteurs nucléaires. Autre exemple, c’est l’industrie nucléaire qui offre l’énergie nécessaire à l’extraction du pétrole des sables bitumineux de l’Alberta (Canada).
Propos recueillis par Matthieu Auzanneau