Dernier avis du Conseil National des Villes

, par  Marie-Odile NOVELLI , popularité : 0%

Réuni en session plénière le 3 Novembre, le CNV (dont je suis membre) a notamment rendu Avis (adopté) sur 
"la Place des entreprises et mixité fonctionnelle dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville1".

Le Conseil National des Villes, émet des recommandations.
Il a pour fonction officielle de concourir " à la conception, à l’élaboration et à la mise en oeuvre de la Politique de la Ville" ( des Quartiers ).
Il se compose de 4 collèges (tous benevoles mais leurs frais de déplacement en train peuvent être remboursés ) : des habitants, des élus , des acteurs économiques et associatifs et des personnes qualifiées. C’est la première fois qu’y sont conviés des habitants.

Voici l’avis émanant des travaux du groupe de travail auquel je participe. Il s’agit d’une auto-saisine sur un sujet large, c’est pourquoi ce groupe a reçu mandat le 3 novembre de poursuivre ses travaux sur les questions de l’emploi (le champ de travail sera défini en décembre [ à venir en bas de page : les avis précedents ]).


PREMIER MINISTRE
Avis du CNV 
Place des entreprises et mixité fonctionnelle dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville1

Résumé des propositions2

Afin d’affirmer la place de l’économie dans la politique en faveur des quartiers prioritaires, le Conseil National des Villes (CNV) estime qu’il convient de s’appuyer sur les dispositifs et institutions existants et d’en améliorer ou renforcer le fonctionnement.
Il propose de :
- systématiser l’intégration des actions économiques dans les contrats de ville et développer le pilotage et l’évaluation de la dimension économique, notamment des engagements des entreprises.
- renforcer l’ingénierie territoriale pour améliorer synergies et cohérence des actions. La dimension d’insertion par l’économique qui fonctionne déjà en politique de la ville doit davantage concerner les petites entreprises et faire l’objet d’un suivi attentif pour des résultats perceptibles par les populations.
- poursuivre les implantations d’activités au sens physique dans les quartiers prioritaires, tant activités tertiaires mais aussi artisanales et de production.
- Intensifier les actions de formation d’éducation et d’orientation à partir des outils existants, en promouvant une culture de l’insertion professionnelle et en pariant sur l’avenir non seulement sur les métiers en tension mais aussi sur des métiers à perspectives méconnues ou sous- estimées.

Accroitre la création d’entreprise sera un défi qui nécessitera une très bonne articulation entre l’Agence France entrepreneur et les réseaux d’aide à la création dont les implantations doivent se renforcer sur les quartiers prioritaires. En effet le CNV a été sensibilisé à la difficulté de trouver la juste place des entreprises dans le pilotage des contrats de ville. Ces dernières sont porteuses d’une vision stratégique territoriale globale, qui permet d’entrevoir le potentiel des quartiers prioritaires à une échelle plus large de l’agglomération ou du bassin d’emploi. Cette difficulté n’est pas insurmontable : elle nécessite de croiser les cultures professionnelles et les échelles de projection, 
(1)ainsi que de lever les méfiances réciproques qui ont pu se cristalliser notamment dans le cadre des programmes de lutte contre les discriminations.
S’il est apparu important au CNV de s’emparer de ce sujet, c’est que depuis trop longtemps le questionnement sur la place des entreprises dans les quartiers prioritaires, court parfois le risque d’apparaitre incantatoire malgré des avancées importantes.

Préambule
Les membres du CNV, par leur avis, souhaitent contribuer, comme le CNV l’a fait dans le passé, à renforcer les dynamiques mises en œuvre par les différents acteurs en faveur du développement économique dans les quartiers prioritaires et pour leurs habitants. Le sujet de la place des entreprises et du développement économique dans les quartiers prioritaires fait en effet l’objet de plusieurs programmes d’action mobilisant un nombre croissant de partenaires.
Au fil des échanges et auditions, il est apparu au CNV qu’il n’était pas opportun de suggérer de créer de nouveaux dispositifs ou institutions mais bien d’apporter son soutien aux mécanismes en place en proposant quelques priorités et pistes de progrès. C’est ainsi que reprenant l’évocation naturelle des synergies régulièrement appelées de leur vœux par les acteurs, c’est bien la synchronisation des actions qui doit permettre de mettre davantage l’économique au cœur de la politique de la ville.

Les recommandations concernent d’une part des démarches transversales, portant sur l’intégration de l’économique dans les contrats de ville, les méthodes de mesure et d’évaluation et le développement de l’ingénierie territoriale consacrée à l’économique.

Elles portent d’autre part sur des actions thématiques concernant l’engagement des entreprises, les implantations physiques dans les quartiers prioritaires, la formation, la création d’entreprise stricto sensu et enfin l’approche par les entreprises des enjeux de la précarité.

A. Systématiser l’intégration des actions économiques dans la politique de la ville notamment dans les contrats de ville
L’intégration des actions économiques désormais prévue par les textes dans les contrats de ville doit être reconnue comme un élément majeur. Affirmer cette volonté d’une place significative de l’économique (au sens à la fois de création d’emploi et de création de richesse) passe par un renforcement de la place des partenaires économiques (entreprises, réseaux d’entreprises organisations consulaires, organismes professionnels) en fonction des enjeux définis localement en les associant au comité de pilotage du contrat de ville.
Plus globalement, pour développer la co- construction, les entreprises pourraient être davantage associées à la gouvernance des projets et leur évaluation, dépassant un rôle de simples financeurs pour contribuer sur le fond des sujets.
Pour faire passer un message fort concernant cette reconnaissance de la place de l’économique dans les quartiers prioritaires, des objectifs mesurés en termes de création d’emploi et d’activités pourraient figurer dans les contrats de ville.

B. Développer le pilotage, l’observation et l’évaluation de la dimension économique
Il semble souhaitable de systématiser les démarches de diagnostics territoriaux consacrés aux enjeux économiques en prenant en compte les attentes et les apports du monde associatif et des entreprises, conjointement avec les préoccupations des élus et des citoyens.
Si de nombreux accords et engagements sont pris par des entreprises (nationales, locales) et des réseaux d’entreprises, il est nécessaire de :
- mesurer périodiquement ces formes d’engagement local des entreprises (emploi, éducation, social, culture),
-  faire des points réguliers sur la dimension réelle de ces engagements,

- détecter le plus tôt possible les points de blocage ou les besoins d’améliorer la 
synchronisation des actions. 
A cet égard, le CNV note avec intérêt que dans le cadre de la Charte Entreprises & Quartiers il est prévu d’engager régulièrement des bilans des nombreuses actions (plus de 400) prévues par la soixantaine d’entreprises signataires de la charte nationale et démultipliées par plus de quatre cent entreprises signataires des chartes locales. Le CNV estime que les informations sur ces actions devraient faire l’objet d’une très large diffusion, en dehors des acteurs concernés, en direction du grand public en mobilisant les médias pour leur fournir une occasion de faire passer un message positif tant sur les entreprises que sur les quartiers prioritaires. 
Les mesures, observations et leur diffusion permettront de mieux piloter, voire de renforcer, les engagements des entreprises, quelques soient leurs tailles, et de leurs réseaux en faveur des quartiers prioritaires. 


Dans le souci de reconnaitre ce qui existe et de mesurer les évolutions, le CNV propose que l’Observatoire national de la politique de la ville (ONPV) puisse mettre en place davantage de variables pertinentes concernant la place des entreprises, l’évolution de l’emploi et de la création de richesse dans les quartiers prioritaires. En effet si les variables concernant l’emploi des habitants des quartiers prioritaires (taux d’emploi, accès aux contrats aidés) sont connues, c’est moins le cas pour les activités économiques implantées sur les quartiers à l’exception des commerces et des ZFU qui font l’objet d’un suivi spécifique sous l’angle fiscal. 
Un répertoire des indicateurs d’activités économiques sur les territoires prioritaires serait utile pour mieux appréhender la notion de mixité fonctionnelle, et apprécier les efforts engagés pour diversifier la structure économique et sociale des quartiers prioritaires. Des mesures de ces indicateurs pourraient être faites sans en attendre des résultats instantanés car la mesure de paramètres économiques peut induire des décalages de plusieurs années. Le développement économique a aussi besoin d’une certaine durée pour être conforté. Il s’appréciera par une réduction, sans doute progressive, des écarts par rapport aux autres territoires.

C. Développer l’ingénierie territoriale
L’ingénierie territoriale dans le champ économique doit être développée par des démarches de construction en commun impliquant des acteurs d’entreprises. Le CNV observe que les divers réseaux professionnels comme les centres de ressources œuvrent en ce sens depuis de nombreuses années. Le CNV note aussi avec intérêt que le développement de l’ingénierie figure dans plusieurs programmes d’actions, notamment dans les engagements pris par la Caisse des Dépôts. Il s’agit d’une tâche « toujours recommencée », compte tenu de la vie des projets et des responsables, des évolutions du contexte institutionnel local et surtout des aléas et des mutations des activités économiques.
Dans les dynamiques locales, il peut apparaître des décalages entre les ambitions et la réalité de terrain. La dispersion des actions et un nombre d’acteurs élevés peut devenir un frein à l’action. Le souci doit être de veiller à la cohérence entre les besoins sociaux et l’offre tout en gérant des actions au plus près du terrain, donc relativement éparpillées en évitant l’impression « d’atomisation » des dispositifs. Le développement de l’ingénierie de projet, permettant de mieux coordonner les actions, doit figurer explicitement dans chaque programme d’action.
Un autre volet du développement de l’ingénierie réside dans la formation des acteurs et opérateurs. Selon des diagnostics propres à chaque territoire, des formations adaptées sur le développement économique et l’entrepreneuriat restent à développer en direction des acteurs de la politique de la ville sur le champ économique, champ parfois moins bien maitrisé que celui de l’action urbaine et sociale. En outre mettre l’accent sur la maîtrise de l’ingénierie de processus devrait permettre de mieux combiner les approches publiques et privées en raisonnant sur la base d’obligations de résultats.

D. Favoriser l’insertion
Conformément au cadre législatif, les clauses d’insertion dans les marchés publics semblent globalement maîtrisées par les grandes entreprises sur le plan contractuel. Elles s’avèrent plus difficiles à mettre en œuvre auprès des PME/TPME. À l’échelle d’un quartier, un taux de 5% aboutit à un nombre d’emplois (exprimé en heures) parfois symbolique et n’est pas la hauteur des enjeux pour favoriser l’emploi des jeunes. Le CNV se réserve dans ses travaux ultérieurs la possibilité d’étudier l’opportunité de demander un accroissement de ces taux compatibles avec les marges d’actions légitimes des entreprises, selon leurs tailles et leurs branches au vu des différents travaux engagés sur ce sujet complexe. De même il n’est pas exclu de s’interroger sur l’extension des clauses sociales dans le champ des marchés privés.
En tout état de cause, c’est bien dans l’application concrète qu’il faut apprécier en quoi les clauses actuelles ont un impact sur les quartiers prioritaires ou bien si leurs effets sont très dilués. Suivant en cela l’opinion exprimée par des maîtres d’ouvrage, le CNV note que pour avoir des impacts effectifs, ces clauses doivent faire l’objet d’un suivi très attentif, le risque étant de les respecter sur le plan formel, sans viser à obtenir des résultats tangibles et significatifs en termes de Contrats à durée déterminés (CDD) et surtout de Contrats à durée indéterminée (CDI).
Par ailleurs ces clauses d’insertion pourraient être élargies à l’ensemble des activités (par-delà le secteur de la construction) et devenir des clauses s’inscrivant dans des démarches de responsabilité sociétale des entreprises (RSE). Par-delà la notion d’insertion, les pratiques d’inclusion économique doivent permettre aux entreprises dans leur politique de recrutement d’identifier des publics défavorisés ou discriminés (populations des QP, handicapés, seniors, jeunes etc..). Les entreprises peuvent aussi contribuer davantage à l’insertion professionnelle des habitants des quartiers par des actions de parrainage, des visites d’entreprises et de découverte des métiers.
Les clauses sociales pourraient devenir des outils qualitatifs pour l’insertion professionnelle des personnes en améliorant la cohérence des parcours.
Institutionnaliser davantage les partenariats sur un grand nombre de territoires est au centre de la Charte Entreprises & Quartiers. Dans ce cadre, le CNV constate que les partenariats entre des entreprises et des quartiers prioritaires existent depuis plusieurs années. Dans leur bilan d’action il pourrait être opportun de vérifier si tant au niveau national que régional tous les quartiers prioritaires sont bien couverts et si certains ne sont pas oubliés.
Le CNV estime qu’il est important d’insister sur cette notion de couverture territoriale visant à l’exhaustivité tout en notant que cela peut obliger à accroître le maillage des actions. Ceci peut concerner notamment les territoires de petite taille ou nouvellement entrés dans le champ de la géographie prioritaire.
Une autre dimension de l’insertion, rejoignant les approches du développement durable, consiste à ce que la fonction « achat », qui représentent près de la moitié du chiffre d’affaire d’une entreprise,
prenne en compte explicitement la dimension locale. Ceci ne peut pas se décréter, mais passe par des actions multiples comme les rencontres, les forums et la montée en niveau des qualifications. Des initiatives en ce sens sont évoquées pour des grandes entreprises pouvant s’investir dans la montée en niveau de leurs sous-traitants jusqu’au rang 4. Mais plus généralement l’achat local peut aussi devenir un réflexe courant dans les pratiques des entreprises quelques soient leur taille et leur champ d’activité.
Ce thème de l’achat local peut aussi être décliné de façon spécifique dans le contexte ultramarin et leurs marchés contraints par l’insularité, ce qui passe aussi sur ces territoires par un renforcement des filières valorisant les attributs et richesses locales.

E. Renforcer les implantations au sens physique dans les quartiers prioritaires
La question des implantations physiques sur les territoires reste un élément majeur qui a une très forte inertie dans des quartiers prioritaires où la densité d’activité marchande reste deux fois inférieures à celle du reste de leur unité urbaine. Et cet écart est encore plus marqué si on analyse les activités tertiaires comme les activités productives. Faciliter l’implantation des structures multisectorielles de proximité dans les territoires prioritaires doit permettre de faire du lien (au sens social et économique) et permet d’accompagner les habitants dans la création d’entreprises. Si le sujet est traité, en termes de réaménagement des espaces physiques, en grande partie dans le cadre du Programme national de renouvellement urbain (PNRU), ce renforcement passe aussi par de nombreuses étapes institutionnelles.
Il apparait souhaitable de décloisonner davantage les distinctions entre baux d’habitation et baux commerciaux, tant en secteur social que dans les copropriétés privées. Ce point mériterait des approfondissements juridiques par les services ministériels et les partenaires concernés.
En matière d’aménagement des espaces la recherche d’une mixité fonctionnelle, qui figure dès l’origine dans les objectifs globaux du PNRU, doit devenir un souci constant dans les projets en termes opérationnels. Ceci peut conduire à gérer des contradictions entre usages habitat et activités, notamment en s’attachant à la réduction de nuisances (réelles ou ressenties). Les nuisances d’usage ont longtemps servi de prétexte pour justifier les zonages fonctionnels traditionnels : Accès livraison, règles de sécurité et de sureté, compatibilité des activités productives avec l’habitat, voisinage impliquant des flux de visiteurs ; ces aspects techniques doivent être pris en compte, et leur coût mis en regard des bénéfices attendus.
Favoriser les implantations comme le développement endogène d’activités passe par une offre en locaux diversifiés : Produire des locaux de tailles adaptées et à prix attractif est un sujet majeur pour l’implantation d’activités qui ont besoin d’avoir un point mort le plus bas possible. Produits standards ou réponses fines à des besoins identifiés, l’équilibre est à trouver entre les besoins endogènes du quartier et la demande exogène. Le développement des activités productives et de l’artisanat sont à encourager de façon concrète dans les quartiers prioritaires, par exemple en facilitant le stockage des produits et outillages, le stationnement des véhicules d’artisans.
Le CNV suivra avec intérêt les suites qui seront données à l’appel à projet organisé par le Commissariat général à l’égalité des territoires (CGET), l’Union sociale pour l’habitat (USH) et la Caisse des Dépôts sur les centres d’affaires de quartiers. Cet appel à projet va en outre s’articuler avec d’autres actions de droit commun initiées ou non avec le renouvellement urbain par exemple dans les locaux proposés par les bailleurs sociaux pour le monde associatif ou institutionnel, ou dans les réaménagement de locaux à l’initiative de l’EPARECA ou d’acteurs privés.
Il conviendra de tirer les enseignements de ces projets et de proposer les conditions de généralisation à une échelle vaste sur un grand nombre de territoires, dans un contexte de concurrence toujours
vives au sein des agglomérations, concurrence où les quartiers prioritaires ont des atouts à valoriser.
Parmi les facteurs de freins au développement des activités économiques, l’attention doit être attirée vers la notion de qualité de service. Si l’agrément des espaces réaménagés peut participer de l’incitation au développement économique, les projets doivent veiller à ce que des niveaux de service (de base) soient disponibles pour les entreprises et leurs salariés en grande majorité Petites et moyennes entreprises (PME) et Très petites entreprises (TPE). Ainsi des avancées en matière d’équipement numérique, surement nécessaires, ne pourront suffire si les services de base (restauration, gardes d’enfants, accessibilité, sécurité) ne sont pas assurés sur certains territoires.
Le CNV suggère que ce point soit suivi de façon méticuleuse dans les contrats de ville, en examinant le réel niveau de service que peuvent trouver les entreprises et leurs salariés dans une implantation sur quartier prioritaire ou à proximité.
Pour favoriser les implantations d’activités, le CNV note que certaines déductions fiscales (exonérations de Taxe sur le foncier des propriétés bâties (TFPB) ou de Cotisation foncière des entreprises (CFE)) dans les quartiers prioritaires s’adressent aux entreprises inscrites au Registre du Commerce et des Sociétés. Ce n’est pas le cas de toutes les activités par exemple des artisans qui peuvent ne pas effectuer d’acte de commerce ou n’être pas constitués en société. Ce point pourrait justifier des demandes d’amendements dans les lois de Finances pour favoriser l’engagement de certaines PME et TPE.
Dans la création d’activité et le développement de l’entreprenariat, les différents réseaux d’appui à la création d’entreprises sont en première ligne depuis de nombreuses années. Si leur vocation est plus vaste que les seuls quartiers prioritaires, il s’est établit un fort consensus pour considérer que c’est aussi là que réside une part importante des porteurs de projet relevant de leur champ d’activité.
Le CNV constate que la Convention de 2015 rassemblant, sous le parrainage de l’État, les principaux réseaux d’assistance à la création d’entreprise et la Caisse des Dépôts prévoit un renforcement des implantations physiques de ces organisations dans les quartiers prioritaires de façon à accroître la part de leurs appuis aux initiatives en émanant. Il est aussi prévu « d’adapter l’offre de service aux besoins de leurs habitants, de manière coordonnée, complémentaire et mutualisée, tout spécialement dans le cadre des contrats de ville ». Ces contrats comportent en effet « un pilier développement économique qui offre un cadre partenarial stable et durable pour soutenir l’entrepreneuriat ».
Le CNV estime que ce mouvement d’implantations physiques et de coordination des réseaux d’assistance est un choix opportun dont il faudra tirer le bilan régulièrement. Cette présence renforcée, pour répondre au mieux aux besoins locaux variables selon les territoires, devrait être portée par des plateformes entrepreneuriales intercommunales ou régionales qui se déclineront en implantations géographiques communes.
A ce titre, le CNV note que s’il appartient désormais à l’Agence France Entreprendre « de coordonner la programmation des financements nationaux aux réseaux d’appui à la création et reprise d’entreprises », et de « veiller au renforcement et à l’adaptation de l’offre de service en faveur des territoires fragiles » ce sont bien les divers réseaux qui sont les acteurs opérationnels. Le CNV suivra avec attention les bilans que l’Agence et ses relais pourront établir de leur action permettant aux porteurs de projet d’identifier aisément leurs interlocuteurs de proximité et de bénéficier d’information et d’appui renforcés.
Dans le contexte ultramarin, où les situations sont encore plus polarisées qu’en métropole, les créations d’entreprises doivent encourager le renforcement de l’économie concurrentielle qui reste modeste face au poids de l’économie résidentielle. Ceci donne une dimension particulièrement importante à la création d’activités productives.

F. Former, éduquer, orienter

La maîtrise de l’économie numérique reste bien inégale selon les quartiers et les porteurs de projet. Les besoins en formation professionnelle des acteurs locaux restent très importants sur la maitrise des outils numériques, spécialement au sein des TPE pour lesquels l’usage de ces outils doit permettre de réaliser des gains de productivité et ne pas devenir des facteurs discriminants sur certains marchés.
Favoriser l’adaptation des potentialités du quartier aux évolutions économiques nécessitent de faire évoluer régulièrement les formations. Faciliter l’employabilité passe par des actions multiformes : formations, aide à la mobilité inclusive, garde des enfants, la liste peut être longue et nécessite des diagnostics minutieux de la situation des personnes. Ceci peut passer par les dispositifs du service public de l’emploi comme par les agences chargées du développement économique local, comme par les initiatives d’autres acteurs concourant à l’équilibre entre vie familiale et vie professionnelle comme le développement de crèches interentreprises par les CAF.
En matière de formation des porteurs de projets face aux nombreux dispositifs et partenariats en place, la coordination des actions (dans l’espace) et leur synchronisation (dans le temps) doit devenir une obligation de chaque niveau administratif ou institutionnel.
Le CNV est très attentif à une préconisation récente du Conseil national éducation économie (CNEE), portant sur la création de Comité locaux école-entreprise (CLEE). Un tel dispositif pourra être particulièrement précieux dans les quartiers prioritaires et il propose que les initiatives en ce domaine soient vivement encouragées.
En lien avec la formation, la sensibilisation à l’entrepreneuriat fait l’objet de nombreuses initiatives. Le CNV observe que la communication vers les principaux secteurs de l’artisanat mérite d’être intensifiée. Des forums et rencontres existent, mais pourraient être multipliés en lien avec l’Éducation Nationale et les collectivités locales. Une culture de l’insertion professionnelle reste à promouvoir auprès des acteurs de l’éducation et leurs équipes pédagogiques, pour que les jeunes soient sensibilisés sur des métiers jugés en tension mais aussi sur les métiers à perspectives méconnues (métiers traditionnels dont l’importance est sous-estimée, métiers en devenir à potentiel incertain). Divers concours et labels valorisent l’entrepreneuriat et la création d’activités, il semble nécessaire de veiller à ce que la diversité soit au rendez-vous, notamment pour que les activités de production n’apparaissent pas au second plan face aux activités de service.

G. Favoriser la création d’entreprise
Sur ce sujet central qui est au cœur de l’activité de plusieurs organismes, les membres du CNV sont convaincus que c’est toute une palette de moyens qui doivent être mobilisés, sans exclusive ni a priori. Chaque méthode et démarche a son degré d’efficacité, que ce soit le développement des activités marchandes et non marchandes, les approches par des entreprises de l’Économie Sociale et Solidaire, et d’une façon plus générale l’amélioration de l’accès à l’information, aux biens et aux services pour les porteurs de projet.
Dans les dispositifs de création d’entreprises, il faut reconnaître une véritable capacité des habitants à apporter leur contribution à ces créations d‘entreprises. Par ailleurs une place accrue donnée à l’entrepreneuriat n’est pas une façon « de gérer une situation économique où l’emploi salarié peine à s’accroître » mais bien le constat que les quartiers ont des potentialités en ce domaine qui demandent à s’exprimer et se développer.
Dans le contexte ultramarin l’approche économique nécessite d’appréhender l’environnement régional, l’étroitesse de marchés insulaires, les tailles et typologies de populations. Il faut garantir la bonne articulation des mesures de la politique de la ville avec l’ensemble des dispositifs fiscaux et économiques qui sont déjà spécifiques à ces territoires. La déclinaison des dispositifs nationaux relatifs au développement économique et à l’emploi, à l’engagement des entreprises et à la mixité fonctionnelle sur les quartiers doit ainsi reposer sur quelques fondamentaux :
 favoriser le développement d’un marché local ce qui suppose aussi la coopération régionale ;
 en amont accompagner la migration de l’économie informelle vers les dispositifs de création 
d’entreprise pérenne ;
 créer les conditions pour l’émergence de l’initiative privée en aidant au passage de micro 
entreprise à de véritables PME ;
 appuyer le développement et la structuration des initiatives qui relèvent de l’Économie 
Sociale et Solidaire. 
Reprenant le thème évoqué sur les implantations physiques sur les quartiers, le CNV retient que les réseaux de la création d’entreprise sont présents dans les quartiers mais de façon hétérogène selon les territoires. Ces réseaux veulent améliorer leur proximité et visibilité (vu par les porteurs de projet, mais aussi les autres acteurs tout spécialement les banques et financeurs privés). Ils veulent aussi coordonner leurs actions. Reprenant la thématique fixée dans la convention mentionnée plus haut un plan triennal d’implantation pourrait être défini entre les réseaux d’aide et l’Agence France Entrepreneur.

H. Renouveler les approches RSE face à la pauvreté dans les quartiers prioritaires
La problématique du développement économique comporte un volet engagement des entreprises au sens de leur responsabilité sociétale et leur relation à l’environnement. Dans le cas des quartiers prioritaires, la question peut être posée des stratégies d’entreprises vis-à-vis de leurs clients et usagers dans des contextes économiques fortement contraints. Le CNV note que différentes initiatives existent portant sur les questions de mobilité des ménages comme de la précarité énergétique.
Parmi les initiatives à développer le CNV note l’intérêt que peut présenter le développement du mécénat de solidarité en direction des quartiers prioritaires. De même les approches portant sur la mobilité inclusive, qui peuvent s’adresser à des populations démunies sur divers types de territoires peuvent concerner certain ménages situés dans des quartiers qui restent et resteront à l’écart du développement de l’offre en transport. Du point de vue du développement économique, les approches globale de la mobilité dans la mesure où ce peut être un élément important pour tout entrepreneur et créateur d’activité.
Le CNV suggère que les démarches portant sur la mobilité inclusive puissent être menée aussi sous l’angle du développement de l’emploi mais aussi des activités entrepreneuriales.

Conclusion
Le CNV, par cet avis, s’inscrit dans la continuité de la plupart des actions engagées en matière de développement économique en faveur des quartiers prioritaires. Il constate, comme dans les mandatures précédentes, que des progrès s’observent par exemple dans les quartiers eux-mêmes situés sur des territoires en développement tandis que sur d’autres les indicateurs économiques et sociaux restent médiocres.
Il note que les besoins restent importants, notamment pour la création de locaux adaptés, les implantions de services favorisant la création et l’accompagnement des entreprises et d’une façon générale un besoin de coordination et de synchronisation entre partenaires locaux. La notion de formation, tant au niveau des habitants, des porteurs de projets que l’amélioration de l’ingénierie territoriale semblent des facteurs clés de succès qu’il convient de développer pour mettre l’économique, perçu comme facteur de progrès social, au cœur de la politique de la ville.
P9
Note 1page 1) Les quartiers prioritaires de la politique de la ville sont définis dans cet avis selon l’article 5 de la loi n°2014 173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine
2 Le groupe de travail animé par un binôme composé d’un membre du Bureau du CNV et d’un membre du collège Habitants s’est réuni six fois et a procédé à dix consultations d’experts extérieurs.


Annexe 1 Liste des personnalités consultées
Mmes et MM.
Mahfoud BENALI
Françoise BERNON
Emmanuel BERTIN
Christelle BREEM
Laurent COPLOT
Arnaud DESJONQUERES Total Direction développement durable Florent DUCLOS CNCRES
Patrick DUGARD ADP Claudine PILTON ARADEL Benoit SENECHAL CDC
Annexe 2 Documents de référence
 « Cycle d’échange CR-DSU » Aradel avril 2015-Janvier 2016
 Circulaire du 25 mars 2015 mesures en faveur des quartiers priortaires dans le champ du 
développement économique et de l’emploi
 « Entreprendre dans les quartiers » BPI France le Lab Terra nova juillet 2016 
Annexe 3 Membres du groupe de travail
AMP Conseil
Le LABO de l’ESS
Chef de projet PdV Ville de Metz - EPARECA
- Chambre des métiers et de l‘artisanat 95

- Adrar Nadir
Collège Habitants
-Ammouche-Milhiet Soraya
Collège Elu(e)s
-Baholet Vincent (co animateur)
Collège Acteurs Économiques et Sociaux
- Bertin Emmanuel
Collège Acteurs Économiques et Sociaux
-Charrier-Izel Patricia
Collège Acteurs Économiques et Sociaux
- Emanueli Florence
Collège Acteurs Économiques et Sociaux
-Errecart Maïté
Collège Acteurs Économiques et Sociaux
Fourny Joël
Collège Acteurs Économiques et Sociaux
-Haddou Djamila
Collège Habitants
- Heinrich Michel
Collège Elu(e)s
-Herichi Christine
Collège Habitants
- Imzil Ahmed
Collège Habitants
- Khaddouchi Rachid (coanimateur)
Collège Habitants
- Nonone Laetitia
Collège Acteurs Économiques et Sociaux
- Novelli Marie-Odile
Collège Elu(e)s
- Ourahmoune Sarah
Collège Personnalités Qualifiées
- Paris Christophe
Collège Acteurs Économiques et Sociaux
-  Parmentier Agnès
Collège Acteurs Économiques et Sociaux
- Rimbault Raynald
Collège Acteurs Économiques et Sociaux
Robert Christophe
Collège Personnalités Qualifiées
-Souillard Denis
Collège Acteurs Économiques et Sociaux
Steinfeld Jean-Alain
Collège Acteurs Économiques et Sociaux
- Wadier Martine
Collège Acteurs Économiques et Sociaux
p10


1 Les quartiers prioritaires de la politique de la ville sont définis dans cet avis selon l’article 5 de la loi n°2014 173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine
2 Le groupe de travail animé par un binôme composé d’un membre du Bureau du CNV et d’un membre du collège Habitants s’est réuni six fois et a procédé à dix consultations d’experts extérieurs.