Directive Bolkestein

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Bolkestein : encore un effort !*

*Bolkestein : encore un effort !*

Par Jean-Luc BENNAHMIAS et Danny COHN-BENDIT et Pierre JONCKHEER
mardi 14 fevrier 2006
. Publie dans Libe

Jean-Luc Bennahmias, Dany Cohn-Bendit et Pierre Jonckheer deputes au
Parlement europeen - Groupe des Verts.

Le vote du Parlement europeen, le 16 fevrier, sur la proposition de
directive sur les services dans le marche interieur, va revetir une
importance cruciale. Les Verts ont depose un amendement de rejet pur et
simple. Ce rejet par une majorite du Parlement etant neanmoins
improbable, nous avons aussi presente des amendements qui transforment
la logique initiale du texte. En effet, les Verts souhaitent garantir la
capacite de chaque Etat membre de definir des missions de service public
et favoriser une convergence des normes nationales qui encadrent la
prestation de services par la definition europeenne de criteres de
qualite et de protection du consommateur.
Nous avons donc depose un amendement excluant les services d’interet
economique general du champ d’application de cette directive, sous peine
de voir les missions de service public subordonnees aux regles du marche
concurrentiel. Par ailleurs, les Verts soutiennent l’elaboration future
d’une directive cadre sur les services d’interet general, definissant
leurs specificites et les conditions dans lesquelles les pouvoirs
publics peuvent les charger de remplir leurs missions.

Devant le tolle provoque par le projet de la Commission d’appliquer le
principe du pays d’origine (PPO) comme regle generale pour la libre
prestation des services, une tentative de "compromis" vient d’etre
elaboree entre le parti socialiste europeen et le parti populaire
europeen (conservateurs). Les Verts restent persuades qu’il serait
preferable d’appliquer clairement le principe du pays de destination a
l’exercice des activites de services, et de cantonner le principe du
pays d’origine au seul droit d’acces a ces activites. Question de clarte
et de securite juridique. Question, aussi, de garantir que le libre
marche des services ne menera pas a un abaissement des normes. Nous
appelons donc tous les deputes attaches au rle regulateur des pouvoirs
publics a appuyer notre amendement qui va dans ce sens. Quant au
"compromis" propose, nous constatons qu’il est d’ores et deja conteste
parmi ses negociateurs eux-memes. Il evacue certes - et c’est tres
important - le principe du pays d’origine. Mais il limite aussi la
capacite des pouvoirs publics a imposer leurs propres normes, notamment
par rapport au travail des independants. Il ne pourrait donc constituer,
au mieux, qu’un pis-aller.

Le "reve europeen", c’est la cooperation et la solidarite entre les
personnes comme entre les Etats. plutot que de faire miroiter aux
travailleurs "de l’Est" les bienfaits du PPO, qui en realite accroitra
la concurrence entre travailleurs, les Verts demandent la levee par les
gouvernements des restrictions a la libre circulation des travailleurs
imposees aux nouveaux Etats membres, qui est contraire aux principes
d’egalite et de non-discrimination presents dans les traites europeens.
Faisons du Premier mai 2006 un moment pour l’unite d’une Europe ou
chaque travailleur disposera des memes droits. Les Verts porteront ce
message aux manifestants le 14 fevrier a Strasbourg, comme ils ont avec
eux la volonte de changer la directive Bolkestein.

Au-dela, la directive services a souvent ete presentee - en general par
les adversaires du projet de Constitution europeenne - comme l’autre
face de celle-ci. Certains ont meme pu pretendre qu’en votant non a la
Constitution europeenne, on votait du meme coup non a la directive
Bolkestein. c’est faux. La directive services n’est pas plus la fille du
projet de Constitution europeenne qu’elle n’est la traduction logique
des traites actuellement en vigueur. Ainsi, non seulement le principe du
pays d’origine ne se trouve pas dans les traites, mais il contredit
d’autres dispositions telles que l’article 50 alinea 3, qui prevoit que
le prestataire de services peut exercer /"son activite dans le pays ou
la prestation est fournie, dans les memes conditions que celles que ce
pays impose a ses propres ressortissants", /ou encore l’article 47.2 qui
est la base juridique pour coordonner les dispositions nationales entre
elles. Les traites europeens comprennent un ensemble de dispositions
partiellement contradictoires et il appartient aux majorites politiques
presentes au Parlement et au Conseil de definir un ordre de priorites.
Il est encore possible d’inverser la logique de la directive Bolkestein.
Si le Parlement europeen parvenait, le 16 fevrier, a extraire de la
directive les services d’interet economique general, les services
sociaux et de sante, a en retirer le principe du pays d’origine et a
garantir l’application du droit du travail et des normes des Etats
d’accueil, quelle meilleure preuve aurait-on de l’utilite de renforcer
encore les pouvoirs de ce Parlement ? A la croisee des chemins
europeens, c’est en tout cas cette voie-la que choisissent les Verts.